Toujours signe d’hospitalité et de convivialité, le thé est généralement servi fort et bien sucré. Il est consommé aussi bien en fin de repas qu’entre les repas.
Le thé vert est généralement parfumé à la menthe, et le thé rouge souvent parfumé aux feuilles d’une variété de géranium. Celui qu’on nomme thé « rouge » est en fait le thé appelé « noir » dans la plupart des autres pays.
Le rituel de préparation du traditionnel thé à la menthe est immuable:
- Rincer la théière à l’eau bouillante et y verser 2 cuillerées à café de thé et un demi-verre à thé d’eau bouillante;
- Mélanger rapidement et jeter la première eau;
- Ajouter le sucre avant de remplir d’eau bouillante et laisser frémir 5 minutes environ;
- Froisser les feuilles de menthe et les mettre dans la théière;
- Laisser encore infuser 5 minutes;
- Servir le thé dans des verres à thé puis vider les verres dans la théière;
- Renouveler cette opération trois fois pour bien mélanger.
La façon de servir le thé obéit aussi à un rituel bien défini : le thé est versé de haut dans les verres, créant une corolle de mousse signant la réussite de la préparation. Cette méthode présente l’avantage d’oxygéner le thé, développant ainsi ses arômes.
Lorsque le thé est prêt à la dégustation, on peut ajouter dans les verres des pignons grillés, des amandes fraîches ou grillées, ou encore des cacahuètes grillées. Le thé aux pignons est une recette spécifique et typique de Tunisie.
Durant des siècles, les tunisiens étaient essentiellement buveurs de café, la consommation de thé dans le pays n’a pris son ampleur flagrante que depuis une bonne cinquantaine d’années.
Pour aller plus loin sur l’origine de la consommation du thé dans notre pays, voici un extrait du livre intitulé « Boissons et civilisations en Afrique » d’Alain Huetz de Lemps :
LA TYRANNIE DU THÉ EN TUNISIE
La conquête de la Tunisie par le thé est beaucoup plus récente que celle du Maroc. A Tunis, on buvait au XVIIIième siècle du café turc et le thé était seulement un objet de curiosité; ainsi, en 1761, un bateau s’échoue sur les côtes de la Régence : on trouve dans la cargaison des boîtes de fer blanc contenant du thé dont on ne sait quoi faire.
Quelques années plus tard, en 1766, un consul anglais offre une caisse de thé et du sucre au souverain mais la consommation reste limitée à quelques riches citadins pendant tout le XIXème siècle. En 1850, le thé est présent sur le marché de Tunis mais on l’ignore encore à Sfax ou à Kairouan. Au début du XXième siècle, la Tunisie est encore le pays du café. Tout change au moment de la guerre italo-turque de 1911-12. En Libye, le thé rouge, c’est à dire notre thé noir, avait été adopté récemment par la population pour des raisons qui restent obscures et avait en partie remplacé le café dans les villes puis avait pénétré dans le sud désertique. Or la guerre provoque l’exode d’une partie de la population vers la Tunisie ; beaucoup de ces réfugiées se fixent en Tunisie (ils sont encore 27000 en 1937) ; pour eux, on importe du thé avec une rapidité stupéfiante, les tunisiens adoptent cette nouvelle boisson : l’importation passe de 100 tonnes en 1917 à 1100 en 1926 et 1900 en 1937.[…] Le thé se répand parmi la population urbaine, mais sans faire vraiment régresser la consommation du café, et pénètre rapidement parmi les ruraux, agriculteurs et éleveurs qui, jusqu’alors, se contentaient de laitages et, pour les grandes occasions, de café. Naturellement, ces nouveaux adeptes du thé doivent l’acheter, de même que le sucre qui l’accompagne. C’est une dépense qui bouleverse le pauvre budget des paysans et le thé est alors qualifié de « plante maudite ». « On nous assure qu’il se trouve des femmes, […] qui pour leur quatre onces de thé (environ 120 grammes) n’hésitent pas à donner au colporteur local la semoule apprêtée pour le repas de leurs enfants »: Jean Despois compare cette passion à l’alcoolisme et considère le thé comme « un véritable fléau social […]. »
Depuis la seconde guerre mondiale, la consommation, donc les importations de thé n’ont cessé d’augmenter. Les importations sont passées de 3077 tonnes par an dans le période 1949-1953 à 12931 tonnes en 1994. Cet essor s’explique par l’accroissement de la population mais aussi par l’augmentation du niveau de vie. Ainsi de 1980 à 1990, la consommation de thé par habitant et par an est passée de 1,3 à 1,7 kg.
Selon les statistiques nationales, la consommation de thé était de 1,7 kg par personne et par année en 1990, de l’ordre de 1,4 kg en 2000 et d’ 1 kg seulement par personne/an en 2015. Cette baisse de la consommation de thé est importante, au profit de la montée en puissance de la consommation de café. Toutefois, la dégustation du thé reste encore fortement ancrée dans la tradition, tant pour les tunisiens que pour les touristes qui le savourent toujours avec plaisir pendant leur séjour en Tunisie et notamment à Djerba.